En tant que marque intégrée à un réseau de distribution, vous pouvez légitimement vous interroger sur la manière dont vos revendeurs définissent leur taux de marge. Par ailleurs, le rapport de force, souvent favorable à la distribution, peut vous laisser penser que vous êtes désarmé face à vos partenaires.
Et bien non : vous disposez également de leviers pour influencer les discussions avec vos distributeurs en votre faveur ! Sidely vous propose donc de parcourir les techniques qui vous permettront d’amener les GMS à baisser leur taux de marge sur vos produits.
Mais avant de nous intéresser aux outils dont vous disposez, nous allons revenir sur la définition du taux de marge, puis nous intéresser à son impact sur votre stratégie de tarification en grande distribution.
Quelques fondamentaux pour commencer.
La marge brute, c’est la différence entre le coût d’achat ou de production d’un produit, et son prix de vente.
Le taux de marge est donc un indicateur qui évalue la rentabilité d’un produit. On l’obtient en divisant la marge commerciale par le coût d’achat ou de production.
Voici la formule qui permet de déterminer le taux de marge brute opéré par votre distributeur sur votre produit :
Attention à ne pas confondre le taux de marge brut avec :
Il est donc fondamental de différencier marge brute et marge nette. Car, si la grande distribution peut réaliser des taux de marge brute dépassant parfois les 50%, seule une analyse approfondie des coûts associés permettrait de mesurer précisément la rentabilité opérée sur un produit en particulier. Par exemple, les supermarchés ont généralement des charges plus élevées sur les produits frais, car la manipulation de denrées périssables implique des frais de personnel supplémentaires.
Au final, la marge nette des grandes surfaces se situerait plutôt entre 1 et 3% selon les produits concernés.
Mais, au final, quel impact sur la vente de vos produits ?
Dans la dynamique complexe de la grande distribution, la stratégie de tarification de votre marque joue un rôle déterminant dans le maintien de vos volumes de vente. Nombreuses sont les marques qui optent pour une stabilité des prix afin de préserver leur part de marché, une démarche qui peut cependant se heurter à la politique tarifaire des distributeurs. En effet, ces derniers peuvent être tentés d'augmenter les prix de vente au détail, impactant directement la perception du consommateur et, potentiellement, les volumes de vente. Alors, comment éviter cet écueil ?
Une baisse du taux de marge de votre distributeur pourrait se traduire par une augmentation des volumes de ventes, à condition que cette réduction soit bien calibrée et n'affecte pas la rentabilité globale de la marque. Par ailleurs, il est essentiel de travailler sur la visibilité marketing de vos produits. Une stratégie marketing différenciée et bien ciblée peut contribuer à renforcer l'attractivité de votre marque et à maintenir la demande, même en cas de fluctuations de prix.
Il est crucial de noter que, dans l'esprit du consommateur, c'est souvent la marque, et non l'enseigne, qui est perçue comme responsable des variations de prix. Cette perception peut avoir des conséquences significatives sur l'image de la marque et la fidélité des clients.
Il appartient donc aux marques de travailler en étroite collaboration avec les distributeurs pour aligner les stratégies tarifaires et assurer une communication transparente avec les consommateurs, dissipant ainsi les malentendus et renforçant la confiance envers la marque.
Mais passons au cœur du sujet et examinons la manière dont les distributeurs déterminent leur taux de marge.
En 2019, un article du Parisien révélait les taux de marge élevés pratiqués par la grande distribution sur certains produits, mais aussi le surprenant écart d’un rayon à l’autre, ou d’un produit à l'autre. Le journal avait d’ailleurs déjà pointé du doigt un phénomène de surmarge sur les fruits et légumes bio, supérieures de 75% à celles d’autres produits, et notait même des variations totalement différentes d’un produit à l’autre au sein du bio, montrant la capacité des GMS à interpréter les raisonnements d’achats et à adapter ses taux de marge pour maximiser les ventes. Un niveau d’informations dont vous êtes la plupart du temps privés, en tant que marques distribuées, faute d’accéder aux sorties de caisse, graal du data sharing.
La même année, toujours sur le thème du bio, Que Choisir considérait que la marge brute de la distribution avait un impact considérable sur le prix final des denrées, rappelant que ces écarts ne sont justifiés par aucun élément chiffré en lien avec “les frais de distribution entre le bio et le conventionnel”.
En France, la vente à perte est interdite depuis 1963, ce qui veut dire que vos distributeurs n'ont pas le droit de revendre vos produits moins chers qu’ils ne vous les ont achetés.
Depuis 2019, la Loi EGalim oblige par ailleurs les distributeurs à opérer un taux de marge de 10% minimum sur la revente de denrées alimentaires. EGalim pose également un cadre plus solide sur les promotions en interdisant les opérations de type “deux produits pour le prix d’un”.
À contrario, il n’existe pas de taux de marge maximum légal, faute de disposition légale en la matière. Les distributeurs ont donc la liberté de marger comme bon leur semble.
Ainsi - comme nous allons le voir plus bas - la détermination du taux de marge sur vos produits dépend plutôt de facteurs extérieurs à la réglementation, tels que la demande et la concurrence.
Sur les produits très demandés et distribués chez les concurrents, tels que le Nutella et le Coca Cola, les enseignes ont tendance à baisser leurs marges, de peur que les clients ne leur préfèrent une autre enseigne. Cependant, même un taux de marge faible peut permettre d’engranger de la rentabilité pour le distributeur si le volume de vente est là ! Par ailleurs, les distributeurs se rattrapent en opérant des taux beaucoup plus élevés sur des produits qui ont le vent en poupe, comme dans le cas du bio en 2019.
Ainsi, d’un produit à l’autre, les variations qui existent dans le taux de marge peuvent être gigantesques, passant de 1% sur certains produits à plus de 50 % sur d’autres ! Il est donc évident que le taux de marge dépend en grande partie de “la loi du marché”, subtile mélange de concurrence et de demande.
Au final, il n’existe pas de manière unique de déterminer un taux de marge, et les entreprises ont tendance à garder ces secrets à l'abri des regards indiscrets, concurrence oblige. On peut cependant citer les principaux critères qui vont permettre aux distributeurs d'établir un taux de marge :
La variation des taux de marges d’un produit à l’autre n’est pas anodine pour les marques. En effet, les consommateurs ne sont pas armés pour interpréter les niveaux de prix en grande distribution. Ainsi, le prix élevé du bio laisse penser que les coûts de production sont au cœur de la cherté, quand il apparaît clairement que la marge distributeur est également significative. Et quand le consommateur estime qu’un produit lui est vendu à un prix injustifié, c’est d’abord l’image de la marque qui en subit les conséquences.
Mais, en considérant les éléments cités plus haut, on voit apparaître les facteurs sur lesquels vous pouvez agir en tant que marque.
Tout le monde n’est pas Coca Cola, certes, et dans la plupart des cas, vos distributeurs essaieront de vous imposer leurs conditions. Face à cet état de fait, une option est de repenser votre stratégie de distribution.
En effet, opter pour un mode de distribution plus intensive pourrait avoir pour effet d’augmenter la pression sur les revendeurs et de diminuer l’impact de la marge distributeur sur le prix au consommateur.
Dans le cas d’une stratégie de distribution exclusive, vous tenterez de maîtriser le taux de marge par les clauses de votre contrat de distribution.
Il y a donc une forte corrélation entre vos choix stratégiques en termes de canaux de distribution et le taux de marge exercé par vos distributeurs.
Mesurer la dépense que vos clients types sont prêts à consentir peut permettre de repenser vos coûts en rétro-engineering. Si votre analyse est solide et repose sur un jeu de données conséquent, partagez-la avec vos distributeurs en leur montrant l’écart entre vos coûts internes et le prix psychologique connu.
Dans une logique de collaboration gagnant-gagnant, incitez vos distributeurs à appliquer un taux de marge qui favorise la maximisation des ventes. Ainsi, plutôt que de vous contenter de livrer un prix de vente conseillé après avoir fait le relevé des prix concurrents en linéaire, vous démontrez à votre partenaire une vraie capacité à écouter le marché et une logique de collaboration vertueuse dont il tirera lui aussi les bénéfices.
Comme nous l’indiquions plus haut, lorsqu’un consommateur achète un produit de manière sporadique, il est moins enclin à avoir un prix en tête. Cette notion, vos distributeurs la connaissent… Si vos produits font partie de cette catégorie, préparez-vous à aborder le sujet lors de vos tournées, et préparez vos arguments !
Enfin, comme nous l’avons vu plus haut, le taux de marge est fortement corrélé aux lois de l’offre et de la demande. Ainsi, une stratégie de prix n’a de sens qu’au regard des prix pratiqués par vos concurrents. Qu’il s’agisse de surveiller les prix de vente pratiqués par vos distributeurs ou les changements de prix stratégiques opérés par vos concurrents, optimiser la collecte et la remontée de données liées aux prix en magasins passe par l’utilisation d’une application CRM conçue pour la GMS.
Le taux de marge pratiqué par les acteurs de la grande distribution est un secret de fabrique bien gardé. C’est pourquoi nous avons décrypté la manière dont vos distributeurs peuvent le déterminer. Il est capital pour vous de mesurer l’impact de la variation du taux de marge sur vos produits, et vous disposez désormais d’un certain nombre d’outils pour rééquilibrer la relation fournisseur / distributeur et pousser vos partenaires à éviter la surmarge. Vous pouvez désormais travailler vos arguments et tenter de développer la coopération pour atteindre vos objectifs commerciaux collectivement !